Golda KLEJMAN née HERCBERG, dite Genia
14 janvier 1914 (Lodz, Pologne) – 5 août 1944 (Auschwitz, Pologne).
22 janvier 2020 par Laurence Klejman
Couturière, membre de la M.O.I., arrêtée le 2 juillet 1943 par la Brigade Spéciale 2 chargée de la « traque aux ennemis intérieurs », internée à Drancy le 23 juillet 43, puis dans le camp parisien satellite de la rue de Bassano (Paris XVIe)[1]. Déportée par le convoi 77, le 31 juillet 1944.
Les années de jeunesse à Lodz, en Pologne
Golda, ma grand-mère, est née le 14 janvier 1914, dans une famille de la moyenne bourgeoisie juive de Lodz (Pologne), quelques mois avant le début de la 1re guerre mondiale[2]. Son père, Ali-Jozef, était musicien[3]. Elle-même pratiquait le piano avec un certain talent, selon son mari. Les informations manquent sur sa famille. Son père, né en 1870, est mort lorsqu’elle était encore jeune. Sa mère, née en 1873, s’appelait Laja Kalenbejn[4] ; Golda avait plusieurs sœurs (2) et frères (3). Après la première guerre mondiale et la mort du père, une société familiale gérait un cinéma, qui était dans la famille depuis 1900, et que son frère aîné, Salomon[5], dirigeait : le Syrena[6], 37 rue Aleksandrowska, dans le district de Baluty, un des deux quartiers juifs de Lodz. Golda y travaillait parfois à la caisse.
Golda n’aimait pas son prénom et l’avait, dit-on, échangé avec l’une de ses sœurs, Genia, dont on retrouve la trace sur une demande de recherche après-guerre et document déposé à Yad Vashem[7]. Ainsi elle était connue sous le diminutif de Genia, prénom qu’elle a utilisé lors de ses activités de résistance dans le groupe de la M.O.I., selon l’historien et résistant David Diamant[8], qui l’a personnellement connue et en a gardé un vif souvenir [9].
À Paris en juillet 1937, expulsée en novembre 1938
Genia est arrivée à Paris le 7 juillet 1937[10]. À l’Exposition Universelle qui bat son plein[11], elle rencontre Szmul Klejman (dit Simon), un séduisant juif polonais arrivé de la petite ville de Piotrkow, près de Lodz, quelques années plus tôt[12], et qui travaille dans la confection. Amoureuse, elle décide de rester en France. Elle dépose, le 2 août 1937, une demande de prolongation de son visa de tourisme pour deux mois[13]. Le 4 août, le Hall des étrangers fait circuler un bulletin de recherches « Urgent » pour vérifier si le visa peut être accordé. Golda est inconnue au fichier criminel et au fichier central, et il lui est accordé de rester jusqu’au 5 septembre 1937. Sur sa demande de prolongation, Golda déclare vouloir immigrer en Amérique et attendre à Paris les papiers nécessaires. Il est peu probable que cette version soit vraie.
Golda et Simon ne peuvent pas se marier légalement et, bien que ni l’un ni l’autre n’ait été pratiquant ni même croyant, ils décident de s’unir devant un rabbin. Certainement en février-mars 1938[14]. Peu de temps après, Genia est enceinte. Le 5 mai 1938, la préfecture de Police remplit un bulletin à son nom. L’imprimé stipule « Refus de Séjour »[15], décision de police de ce jour. Elle est alors censée être domiciliée 20-22, rue Richer. Elle est mise en demeure de quitter le territoire à la date du 13 mai 1938, son « visa limité expiré ». L’imprimé précise : « La notification écrite de cette décision lui servira de pièce d’identité jusqu’à son départ ». Golda déclare se rendre à l’étranger. Le couple n’a probablement pas obtempéré dans les délais, car Simon a raconté ensuite qu’ils avaient dû s’enfuir en sautant par la fenêtre lors d’un contrôle de police. Il décide cependant de partir à Bruxelles[16] où Simon (et peut-être Genia) a de la famille. C’est là que naît leur fils, Edward, le 27 décembre 1938. Simon et Golda déclarent des adresses différentes. Quand elle accouche, elle demeure « officiellement » 117, rue du Brabant (Schaerbeek), comme l’indique le bulletin que l’hôpital transmet à la police des étrangers.
Dès les premiers jours de la guerre, Simon passe la frontière et vient s’engager à Valenciennes dans la Légion étrangère, comme de nombreux Juifs étrangers le font partout en France à ce moment-là[17]. Genia Hercberg rentre à Paris avec leur bébé, qui porte son nom de jeune fille, le 24 décembre 1939, sous couvert de passeport polonais n° 1565/37 délivré à Lodz le 17 juillet 1937, prorogé à Bruxelles jusqu’au 27 mai 1940. Elle est mise en règle comme « Polonaise », c’est à ce titre qu’elle était titulaire d’une carte d’identité établie le 9 juin 1942, en France, valable jusqu’au 30 novembre 1943[18]. Elle a le statut de femme de militaire français, car, miraculeusement, elle s’appelle désormais Klejman[19].
Retour à Paris après la déclaration de guerre l’engagement de Simon comme volontaire
Golda habite dans différents endroits, notamment dans le IIIe, rue Barbette[20], avant de s’installer 4, rue de Varize, dans le XVIe arrondissement, où résidait un oncle de Simon, Nathan Klejman. Le soldat Szmul Klejman est fait prisonnier en juin 1940 et envoyé dans les Alpes autrichiennes, notamment à Markt Pongau dans la province de Salzburg, au stalag XVIII C[21]. Certainement grâce à ses contacts avec des militants politiques, qui lui ont fourni des « papiers » (un certificat de mariage officiel ?), Genia / Golda est donc déclarée femme de prisonnier français, un statut qui la protégera jusqu’en juillet 1944, sous le nom de Golda Klejman[22]…
Je ne possède aucun indice sur son engagement politique en Pologne, mais selon David Diamant, Genia militait déjà avec lui à Paris avant son départ en Belgique en 1938 : « Je vois encore Genia, de taille moyenne, vive et énergique, accomplir toutes les tâches que je lui confiais, car elle militait dans mon secteur, avant la guerre.[23] » C’était le Secours populaire[24]. Simon, qui a survécu à la guerre et a été socialiste jusqu’à la fin de sa vie, ne m’a rien dit à ce sujet ; j’en déduis, peut-être à tort, qu’elle s’est politisée en France, au contact du monde du travail qu’elle n’avait pas connu directement en Pologne. Elle aurait été communiste et, la guerre commencée, s’est très vite engagée dans la résistance, dans le « réseau de la casquette[25] », et, après sa création en avril 1943 à l’UJRE, liée à la Main d’Œuvre Immigrée (M.O.I.).
Déclarée comme employée quand elle est arrivée en France, elle a travaillé dans le milieu de la confection, comme la plupart des gens de son entourage. Certainement déjà avant la guerre, et en tout cas en 1940, car, toujours selon David Diamant, dès son retour en France, « elle travaille dans une grande fabrique de mode où elle réussit à organiser des groupes syndicalistes clandestins parmi les travailleuses françaises. Elle distribue des tracts parmi les ouvrières de son métier. » Elle travaillait en réalité chez Paquin, rue de la Paix[26]. Étant donné la qualité de quelques vêtements qu’elle s’est confectionnée alors et dont j’ai pu hériter, grâce à une de ses voisines et amie, elle était une très bonne couturière, mais je ne sais pas quel poste elle y occupait. En tout cas, ses qualités ont été appréciées alors même qu’elle était internée à Drancy, comme nous le verrons ensuite.
« Deuxième filature » de la M.O.I. et arrestation
Le 2 juillet 1943, à 8 heures du matin, la police française – les Brigades Spéciales 2 (BS2) – sonne à la porte du domicile de Golda, 4 rue de Varize, au 3e étage, dans le XVIe arrondissement de Paris, près du métro Exelmans. Par bonheur, son fils de 4 ans n’est pas dans l’appartement (peut-être en nourrice ?), mais la police a connaissance de son existence. Elle est immédiatement emmenée à la préfecture, au 2e étage, où elle sera interrogée le jour-même. Golda est en possession d’une carte d’identité d’étranger valable jusqu’au 30 novembre 1943[27].
Golda vient d’être embarquée dans ce que l’histoire de la Résistance a retenu sous le nom de « deuxième filature » de la M.O.I., dite aussi « des adultes », et la préfecture de police sous le nom de « Affaire Lerner ». Soixante et onze personnes sont arrêtées, toutes suivies depuis des semaines par les inspecteurs de la Brigade spéciale 2, renforcée d’agents de police des commissariats de quartier. Pour Golda, ils étaient quatre à se relayer, dont les noms figurent sur un bel organigramme établi par une police qui se voulait scientifique[28]. La deuxième filature portait sur la branche politique de la M.O.I[29], affiliée au parti communiste clandestin.
En quoi consistaient exactement les activités de Golda ? Je n’en sais pas plus que ce qu’en raconte David Diamant [30] : « Elle distribue des tracts parmi les travailleurs, organise des actions et est très populaire parmi les ouvrières de son métier. Genia travaille simultanément dans le groupe syndical juif. Dans son logement ont lieu des réunions de la Commission intersyndicale juive où sont élaborés des plans de lutte contre l’occupant.[31] » Son amie et voisine juive russe, Isabelle Izikowieff, qui a été ma « babouchka » bien plus tard, m’a dit que Genia l’avait à plusieurs reprises prévenue que des rafles devaient se produire et les avait ainsi protégés, elle et ses deux enfants, après la déportation de son mari. Genia disposait donc d’informations précises et fiables. Elle n’en a pas moins été arrêtée.
L’inspecteur de la BS2 qui rédige le procès-verbal de sa « mise à disposition » précise qu’elle est « inconnue à notre Direction ainsi qu’aux Archives de la Police judiciaire. Son nom n’est pas noté aux Sommiers judiciaires ».
Durant l’interrogatoire, pratiqué le jour même de son arrestation et qui se déroule en français qu’elle dit parler, Golda/Genia affirme ne rien savoir de menées communistes ou autres et n’a « jamais été sollicitée pour être membre d’une organisation quelconque ». En cela, elle réagit conformément aux instructions données par le parti communiste et les organes de résistance.
Il lui est reproché d’être en contact avec deux hommes qui semblent être alors importants aux yeux de la police, Borszeczewski et Bessermann[32]. Ils seraient venus à son domicile. Elle dit n’avoir jamais vu le premier, mais reconnaît Bessermann sur une photo. Sans doute a-t-elle compris qu’elle a avait été suivie et ne nie donc pas la rencontre avec Bessermann. Mais elle part dans une explication abracadabrante : elle l’aurait contacté, par l’intermédiaire de collègues de chez Paquin, pour faire réparer un manteau. Il serait venu la relancer chez elle le 21 ou 22 juin, mais comme il lui demandait 600 francs pour le travail, elle n’aurait pas donné suite.
Elle a été arrêtée tôt le matin, et, au moment de l’interrogatoire, elle a déjà dû séjourner dans les minuscules cellules de la préfecture, où sont entassées les nombreuses femmes qui sont arrêtées ce jour-là, ou même avant, car l’opération dure depuis l’arrestation de Lerner[33], le 29 juin. Probablement battue aussi, comme le rapportent des survivants[34], et on l’imagine à bout de forces, elle invente une explication très peu convaincante. Étant elle-même couturière, pourquoi faire appel à un tailleur, surtout en temps de rationnement ?
La fouille n’a rien donné, mais la visite domiciliaire chez elle, à laquelle elle a assisté, fait apparaître trois cartes de textile aux noms de Malamont, Rappoport[35] et Hercberg, ainsi qu’un livret militaire et un passeport polonais au nom de Hercberg. Elle répond, aux questions des inspecteurs, qu’ils appartiennent à des Juifs arrêtés, et le passeport à un cousin déporté. Elle est maintenue dans les locaux de la préfecture, et peut-être transférée un moment dans une prison parisienne, mais le 14 juillet, elle est encore signalée au dépôt de la préfecture. Je n’ai trouvé qu’un interrogatoire la concernant, daté du 2 juillet. Y en eut-il d’autres avant le 22 juillet 1943 ?
Drancy et le convoi 77
Golda arrive à Drancy le 22 juillet, en provenance de la Préfecture. Son numéro d’immatriculation est 3227. Le 23, elle change d’escalier, passe du 21-3 au 13-1[36].
Elle n’est pas déportée immédiatement, comme le sont le plus souvent les militants passés par la BS1 ou la BS2. Au contraire, son statut de femme de prisonnier la protège un moment, sa fiche d’internement est de couleur bleue, qui met sa déportation en suspens.
Pourquoi ? Arrêtée et suspectée d’être communiste résistante, a-t-elle réussi à convaincre le commissaire de la BS2 qu’elle n’était pas impliquée ? Elle est quand même restée vingt-deux jours à la Préfecture (et peut-être dans une prison parisienne) et est signalée comme « remise aux AA » (autorités allemandes) ! Quelques personnes arrêtées dans la même rafle sont relâchées et mises hors de cause (pour mieux être suivies ?), ce qui n’est pas son cas. Golda/Genia, avec son histoire si bête, aurait-elle bénéficié de « clémence » et être uniquement considérée comme juive ? J’avoue ne pas être en mesure de le savoir.
En tout cas, au sein du camp, son activité de résistance ne cesse pas, selon David Diamant. « Genia est arrêtée en juillet 1943 et transférée à Drancy, où elle l’est l’une des organisatrices du travail de solidarité à l’intérieur du camp. Elle est en liaison avec la direction de l’organisation clandestine de l’extérieur.[37] » Je n’ai pas retrouvé son nom sur l’organigramme des prisonniers remplissant une fonction « officielle » dans le camp.
Onze mois plus tard, le 24 juin 1944, Golda/Genia quitte l’escalier 15-2 du camp et est envoyée dans un D.W., l’un des camps satellites de Drancy à Paris, celui du 2, rue de Bassano ; un petit camp (cinquante-neuf prisonniers) qui regroupe depuis le 14 mars 1944 des Juifs français, des femmes juives de prisonniers de guerre, des « conjoints d’Aryens » et des « demi-Juifs »[38]. Dans le dossier aux Archives de Caen, se trouve une lettre à en-tête du Secours National La Famille du Prisonnier de Guerre, avec un tampon de réception du 4 mai 1945. C’est une demande d’avis de recherche sur Mme Klejman, née Génia Arzberg (sic), pour le compte de son mari prisonnier de guerre : « Mme Klejman nous a toujours dit ne pas être israélite elle n’en a pas moins été arrêtée en juillet 1943 et mise en camp de concentration elle a été relâchée en 44 pour être prisonnière libre 2 rue de Bassano elle était reconnue non juive et ses jours de congé circulait sans étoile ». On appréciera la notion ubuesque de « prisonnière libre », « relâchée » d’un camp pour un autre ! Quant au fait qu’elle ne serait pas juive et que « les Allemands prétendaient n’attendre qu’un papier de Pologne pour la relâcher », comme le dit ensuite la lettre, c’est pour le moins bizarre. Dans la mesure où Golda/Genia est arrivée à Drancy avec d’autres résistants de la M.O.I. arrêtés dans la même rafle, et qu’elle a reconnue être juive durant son interrogatoire, cela semble très étrange. Les autorités du camp de Drancy avaient forcément des relations avec les Brigades Spéciales ! À moins que des pièces aient pu « disparaître » complaisamment. Par ailleurs, qui est à l’origine de cette affirmation ?
Basée dans le camp Bassano, Golda/Genia travaille à la confection de vêtements pour une « importante maison de couture ». Ce que je sais a été raconté par deux amis rencontrés dans ce très petit camp : Georges et René Geissmann. Ces deux frères, des industriels et hommes d’affaires, l’un parisien et l’autre de Casablanca, originaires de Belfort, ont été arrêtés à Marseille pendant la grande rafle de janvier 1943 [39]. Golda/Genia a donc continué à travailler pour la maison Paquin, comme avant son arrestation, et était autorisée à sortir en ville. « Klejman aurait pu se sauver étant en liberté provisoire certains jours mais n’a pas voulu le faire afin de ne pas faire fusiller ses camarades », dit la lettre déjà citée (qui pourrait bien être d’un des deux frères Geissmann). En effet, les Geissmman ont raconté qu’afin d’éviter qu’elle ne s’évade, les autorités du camp de Bassano l’avaient prévenue qu’ils déporteraient ses deux amis s’il lui prenait la fantaisie de ne pas rentrer. Elle est toujours rentrée.
Grâce à je ne sais quel système D (je n’ai pas eu la chance de connaître les deux amis de ma grand-mère, morts avant ma naissance), Genia avait pu introduire son fils dans le camp Bassano. D’autres enfants vivaient avec leur mère, femmes de prisonniers de guerre ou de Juives mariées à un « aryen », dans les combles de cet hôtel particulier du XVIe arrondissement, à deux pas des Champs-Élysées, confisqué à la famille Cahen d’Anvers. Or, Edward n’est pas enregistré officiellement. Il est « caché » à l’intérieur du camp, mais joue avec les autres enfants et même avec un jeune soldat allemand et son chien berger – allemand, lui aussi. Quand des « officiels » viennent faire une visite de contrôle, il est caché sous un tas de tissus sous des tables. Un jour de juin, Renée Primorin, la femme de Georges Geissmann, qui n’était pas juive, est venue lui rendre visite et est repartie en tenant Edward par la main. Accompagnée à la grille par ce même soldat allemand qui lui a souhaité bonne chance[40]. Genia avait confié son fils, certaine qu’elle allait bientôt le retrouver. Ses deux amis lui avaient assuré qu’ils s’occuperaient d’elle et de l’enfant après la libération, qui ne devait pas tarder. Ils lui avaient aussi donné des noms de villages normands, en zone déjà libérée, pour qu’elle puisse indiquer une adresse où se trouvait son fils, car les Allemands savaient qu’il existait et lui demandaient régulièrement où il se trouvait[41]. On notera qu’aucun prisonnier n’a dénoncé la présence d’un enfant non enregistré.
Quelques semaines plus tard, le 18 juillet, les Allemands ont appelé une personne pour la reconduire à Drancy. La femme a protesté : elle était arrivée après Genia, ce n’était pas juste qu’elle parte avant elle. Elles sont parties toutes les deux. Si le nom de cette femme était bien entendu connu des deux frères Geissmann, il n’est pas arrivé jusqu’à moi.
Le convoi 77 est parti de Drancy le 31 juillet 1944. Il déportait 1310 personnes, dont plus de 300 enfants raflés dans les maisons de l’UGIF par Alois Brunner (le dirigeant du camp) et un nouveau-né, né dans le camp de Drancy[42]. J’ose imaginer que Genia a eu pour consolation de savoir que son fils « Eddy » n’était pas du nombre. Tous les enfants gardés officiellement rue de Bassano ont été déportés, la plupart à Bergen Belsen. Eddy, libre, a filé vers le sud avec sa nouvelle « maman », a vu le débarquement en Méditerranée le 15 août, les aviateurs que Renée soignait, les villageois qui refusaient un abri à Renée, sa vieille maman et ses fils parce qu’ils craignaient un retour des Allemands et des représailles. Et la joie de la Libération.
Les deux frères Geissmann ont été ramenés au camp de Drancy le 5 août, avec les autres internés de Bassano survivants. Alois Brunner n’a pas eu le temps de les faire partir dans l’ultime convoi qu’il espérait envoyer en Pologne. Ils sont libres quand les Allemands quittent Drancy, le 18 août. Ils reviennent provisoirement à Marseille où plusieurs membres de la famille avaient une entreprise avant la guerre. Leurs biens avaient été aryanisés. Eddy est avec eux, et commence sa scolarité à Marseille.
Pourquoi Genia, cette femme qui avait trente ans, était en relativement bonne santé et apte au travail, n’a-t-elle pas été dirigée vers les commandos de travail mais vers la chambre à gaz[43] ? Les documents officiels stipulent qu’elle a été gazée dès son arrivée. La défaite approchant, les nazis liquidaient le plus possible de déportés. J’aime imaginer qu’elle n’a pas pu s’empêcher de tenir un enfant par la main, elle qui en avait un en bas-âge. Ce n’est pas improbable, de nombreux témoignages mentionnent de telles attitudes qui ont conduit à la mort certaine celles qui auraient peut-être pu avoir un délai.
Pendant longtemps, mon père a voulu croire que le convoi n’était pas arrivé à destination, bombardé par des avions alliés. Son père, Simon, rentré du camp de prisonniers où il était en Autriche, est allé tous les jours pendant des semaines à l’hôtel Lutetia lire les avis, chercher des témoins. Puis il est parti en Pologne, a écumé les camps de transit ; il n’a rien appris sur Genia, mais il a retrouvé le plus jeune des frères Klejman, rescapé d’Auschwitz. Ils ont mis des mois pour revenir à Paris. De la famille de Simon, ils étaient les seuls survivants. Edward, mon père, est resté vivre avec la famille Geissmann, composée de Georges, Renée son épouse, et leurs fils François et Maurice. Il n’avait gardé aucun souvenir de Simon, parti à la guerre en 1939, mais le vit régulièrement quand la famille Geissmann est revenue s’installer à Boulogne. Simon ne s’est jamais remarié, disant attendre le retour de sa femme. Il m’a donné quelques vêtements et objets qu’il avait pu récupérer bien que l’appartement où habitait Genia ait été pillé, puis repris par une famille. Lui s’est installé dans le même immeuble, dans une petite pièce, pour attendre le retour de sa femme. Il a fini par déménager et s’installer dans un appartement à côté de celui de son frère qui s’était marié, à Levallois-Perret. Ils ont vécu côte à côte jusqu’à la mort de Simon. Simon a néanmoins gardé en location ce petit rez-de-chaussée du 4, rue de Varize, et mon père après lui, « au cas où » ; c’est là que j’ai rédigé ma thèse d’histoire.
En guise de conclusion
Dans les papiers des archives à Caen, j’ai trouvé que Simon Cleman a tenté de faire reconnaître le statut de déporté-politique, à titre posthume, à Golda Klejman. Le comité d’attribution lui a répondu que c’était impossible. D’une part, parce que Golda était entrée en France après le 1er septembre 1939 (un texte de loi donne cette date butoir), d’autre part, lui, Simon, n’était pas autorisé à faire cette demande, puisqu’il avait dû reconnaître son enfant après-guerre et que cela indiquait donc qu’il n’était pas le mari de Golda. Les deux points sont incontestables. Le troisième aussi : elle était étrangère. Il ne s’agissait pas de demander autre chose que le statut de déporté politique, ce qui n’était pas la même chose que déportée résistante !
Néanmoins, les pièces prouvant qu’elle était en France jusqu’en mai 1938 (arrêté d’expulsion) et le dossier de police prouvant son arrestation pour faits de résistance, qui constituent des pièces sur lesquelles le comité s’est appuyé pour rendre son avis, auraient pu les inciter à une plus grande tolérance. D’autant plus que les témoignages de son action ne manquaient pas parmi les survivants. Combien de Français résistants de la dernière heure ont paradé avec des rubans indûment, mais officiellement, acquis ?
Sources
TÉMOIGNAGES
David Diamant, ami et camarade syndicaliste, politique et de résistance.
Ida Ravanel, née Klejman, cousine de Simon Klejman, qui a fréquenté Golda pendant la guerre.
Renée Primorin Geissmann, qui a connu Golda lors de ses visites rue de Bassano à son mari, Georges. Elle a sauvé la vie du fils de Golda, mon père, et l’a élevée comme son propre enfant.
LIVRES
Diamant (David), Combattants, héros et martyrs de la Résistance : biographies, dernières lettres, témoignages et documents, Messidor, 22 mars 1984, FeniXX réédition numérique (Pneumathèque) (1 janvier 1984). Une première édition de ce livre est parue en 1962, sous le titre : Héros juifs de la Résistance française, Ed. Renouveau.
ARCHIVES
Archives de la Division des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC), à Caen. Dossier KLEJMAN. Cote N° 21 P 469 319, dossier numérisé par Alexandre Doulut et Sandrine Labeau pour Convoi 77.
Archives Nationales, « Fonds de Moscou » Dossier 19940451-142-12221_AN.
Fichier Drancy, fiches individuelles, cahier d’entrées et cahier de mutation. Consultés en version numérisée au Mémorial de la Shoah.
Archives de l’Amicale des Anciens prisonniers de guerre des Stalags XVIII, AN 72AJ/2612-72AJ/2614.
Archives de la Préfecture de Police de Paris, Dossier de la BS2, « Affaire Lerner », « Mise à disposition » et « interrogatoire de Golda Klejmann » (sic), 2 juillet 1943, consulté en version numérisée au Mémorial de la Shoah.
Archives Nationales de Belgique, consultées et photographiées à Bruxelles par Evelyne Haendel, que je remercie vivement ici pour son aide et sa gentillesse.
Yad Vashem. Feuille de témoignage de Mme Elzon (Sabine) datée du 24 décembre 1995 au nom de Genia Kleiman, née Herzberg, couturière. Consulté en ligne sur le site de Yad Vashem.
Sources complémentaires
Courtois (S), Pechanski (D), Rayski (A), Le Sang de l’étranger. Les immigrés de la M.O.I., Fayard, 1989.
Diamant (David), Les Juifs dans la Résistance française 1940-1944 (avec armes ou sans armes), Le Pavillon- Roger Maria Éditeur, 1971. Prix Maurice Vanikoff.
Dreyfus (Jean-Marc) et Gensburger (Sarah), Des camps dans Paris. Austerlitz, Lévitan, Bassano, juillet 1943-août 1944, Fayard, coll. « Pour une histoire du XXe siècle », Paris, 2003.
[1] Ceci est une tentative pour rédiger une biographie à partir de documents épars, de (rares) souvenirs familiaux. D’autres recherches sont en cours pour tenter d’éclaircir les zones qui pourraient l’être, si les archives le permettent. Un grand merci à Evelyne Haendel pour ses recherches précieuses à Bruxelles, qui nous ont fait, entre autres, découvrir des photos inconnues de Golda et Simon.
[2] Feuille de témoignage du 14 décembre 1995, formulaire de Yad Vashem, de Mme Elzon. La demande, rédigée en caractères romains et hébraïques (sauf le nom) indique témoigner sur : Kleiman Genia née Herzberg en 1914 Lodz Polin ; couturière ; résidence permanente, Bruxelles ; pendant la guerre : Paris : lieu de la mort : Camp de Drancy. La rédactrice, une ancienne militante de la MOI, l’a-t-elle connue personnellement ? Ou s’est-elle inspirée de la biographie de David Diamant, qui donne tous ces détails ?
[3] Le 2 juin 1943, lors de l’interrogatoire de Golda, le nom de son père est précédé de la mention « feu ». « Musicien », sa profession, si c’en est une, est connue par la vulgate familiale. Rien, pour l’instant, ne le confirme.
[4] Selon l’écriture manuscrite de Golda. D’autres papiers indiquent Kaleztajn ou Laïa Kalsztan. Ceux du recensement de Lodz, en Pologne, non datés mais entre 1916 et 1921, orthographient Kalstein. Jusqu’à la lecture des interrogatoires de Golda et du dossier déposé aux archives de Caen, nous ignorions les noms et prénoms de ses parents.
[5] Ce frère, Solomon (Sholem) Hercberg, a joué un rôle infâme dans le ghetto de Lodz, que, heureusement (!), Genia n’a pas été en mesure de connaître. Il assumait le commandement de la prison et a été convaincu de s’être enrichi à cette occasion. Il était un « salaud ». Lui, sa femme et leurs trois fils ainsi que sa belle-mère ont été arrêtés et déportés en mars 1942 à Chelmno. Nous ne savons pour l’instant rien d’autre sur le reste de la famille Hercberg. Leurs noms ne sont pas recensés dans la liste des personnes du Ghetto de Lodz enterrées entre 1940 et 1944.
[6] Publicité en polonais, trouvée dans un magazine polonais., cf Cinema-Theater Syrena, Lodz DSC http://www.iub.edu/~lodzdsc/omeka-2.3.1/items/show/272. L’annuaire professionnel de Lodz en 1926 indique qu’il existe depuis 1900 et que les propriétaires en sont une société composée de la mère (veuve) et de tous les enfants.
[7] Entretien en 1985 de Laurence Klejman avec Ida Ravanel, née Klejman, cousine de Simon et fille de Nathan. Sur sa sœur, Golda-Genia, cf. ghetto de Lodz, Yad Vashem, en ligne.
[8] David Diamant, né David Erlich à Hrubieszow, en Pologne, le 18 mars 1904, mort en France en 1986, est un syndicaliste et militant de l’UJRE, journaliste, résistant et historien qui a consacré de nombreux travaux à la résistance juive. La plus grande partie de ses très abondantes archives personnelles ont été entreposées à la Bibliothèque marxiste puis déposées, en 2005, par le parti communiste français aux Archives départementales de la Seine Saint-Denis, qui les a inventoriées (Fonds David Diamant 335J 1-191. 1919-1986). Une autre partie se trouve à la BDIC (fonds David Diamant CMXXV 1-169) et au Mémorial de la Shoah, au CDJC.
[9] Entretien de Laurence Klejman avec l’historien et résistant David Diamant, en septembre 1983, alors que M. Diamant préparait une nouvelle édition de Combattants, Héros et Martyrs de la Résistance qui recense les membres juifs et communistes de la Résistance. Il avait lui-même rédigé la notice sur Genia dans la première édition (1962) et se souvenait très bien de sa camarade de lutte.
[10] Demande de prolongation de visa faite par « Hercberg Golda », signé et écrit de sa main, datée du 2 août 1937, auprès de la préfecture de Police de la Seine. Mention manuscrite au crayon gras bleu : « entrée le 7-7-1937, dem. prol. 2 mois, déclare vouloir immigrer en Amérique et attendre à Paris les papiers nécessaires. Prolongé jusqu’au 5 septembre 37. » Elle se déclare « employe » (sic), de nationalité polonaise, et dit demeurer à l’hôtel « Unic », bd du Temple, Paris 3e, pour rester à Paris. Motif du voyage : Tourisme », (ajouté au crayon à papier 1 novembre »). Dossier 19940451-142-12221_AN, dit « Dossiers du Fonds de Moscou » aux Archives Nationales (Pierrefitte). Ce papier est le seul exemplaire de l’écriture et de la signature de ma grand-mère que nous connaissons.
[11] Pour travailler, selon la vulgate familiale, sur le stand de la Pologne lors de l’Exposition Universelle. Ce qui est improbable. D’une part, parce que Golda était juive et que depuis 1935 les exactions antijuives se multipliaient sans que cela ne préoccupe l’État polonais ; d’autre part, parce que l’Expo Universelle a débuté en mai pour se terminer fin novembre. Si Golda était venue pour y travailler, ses papiers seraient en règle jusqu’à cette date. Or il n’en est rien.
[12] Selon les dire de Simon, qui a toujours prétendu être arrivé à 20 ans, ayant dû fuir de Pologne dans la nuit pour de mystérieuses raisons. Selon la préfecture de police, il serait entré le 1er mars 1937, muni de la carte d’identité polonaise n°651 426, délivrée le 3 mars 1932 à Miasta Piotrkow (Pologne).
[13] In dossier versé à la Division des Archives des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC), à Caen. Cote N° 21 P 469 319, numérisé par Alexandre Doulut et Sandrine Labeau pour Convoi 77.
[14] Témoignage oral de mon grand-père, fier que son fils ait été conçu dans le cadre du mariage. Selon mon père, qui l’a pourtant peu connue, sa mère était une femme libre qui ne s’encombrait pas de ce genre de préjugés. J’ai tendance à le croire.
[15] Refus de séjour (Application de la circulaire ministérielle n°350 du 1er février 1938). Dossier de Moscou, loc cit.
[16] David Diamant écrit : « J’avais discuté avec elle avant son départ en Belgique. Son mari m’a expliqué les raisons de son départ ». Mais Diamant ne les indique pas… D. Diamant, Combattants, Héros et Martyrs de la Résistance, 2e édition, 1983, p. 167. A ?N Belgique, à Bruxelles
[17] Voir à propos des Juifs engagés volontaires, Ivan Jablonka, Histoire des grands-parents que je n’ai jamais eus, La Librairie du XIXe siècle, Seuil, 2012.
[18] lettre du 21 septembre 1958, d’un expéditeur officiel non identifié (Préfecture de Police ?) adressée à Edward-Josef CLEMAN, sur ses parents. La carte d’identité d’étranger figure dans l’interrogatoire de police de la BS2, cf. plus loin.
[19] Je n’ai eu connaissance de ces détails qu’après la mort de mon grand-père et je n’ai donc aucune information sur le faussaire qui a fabriqué ces vrais-faux papiers, qui ont fait illusion jusqu’aux derniers jours de Golda.
[20] Entretien de Laurence Klejman avec Ida Ravanel, née Klejman, cousine de Simon. Ida m’a emmenée devant la grille de cet immeuble (qui était à 30 mètres de mon appartement, rue Vieille du Temple) et m’a proposé de sonner… Un jeune homme, footballeur au PSG, nous a laissé entrer. L’appartement, selon Ida, avait beaucoup changé. Le Marais s’est entièrement gentrifié et n’a plus rien à voir avec le quartier dans lequel vivaient les immigrés juifs.
[21] Archives de l’Amicale des Anciens prisonniers de guerre des Stalags XVIII, AN 72AJ/2612-72AJ/2614. Photos personnelles de Simon avec le cachet du stalag. En fait, il a été dans plusieurs stalags, de plus en plus durs, car il s’est évadé plusieurs fois et a été repris.
[22] Une lettre à en-tête du Secours National – La Famille du Prisonnier de Guerre, datée du 4 mai 1945 est une demande d’avis de recherche sur Mme Klejman, née Génia Arzberg (sic) juillet 1944, pour le compte du prisonnier « israélite » Simon Klejman, prisonnier au Stalag XVIII C, N° 14985, in Dossier Golda Klejman, N° 21 P 469 319 (DAVCC Caen).
[23] David Diamant, Combattants, op. cit., p. 167, note de bas de page.
[24] Ibid.
[25] Entretien de Laurence Klejman avec David Diamant, en 1983.
[26] APP, dossier de la BS2, « Affaire Lerner », interrogatoire de Golda Klejmann (sic), du 2 juillet 1943, consulté au Mémorial de la Shoah en version numérisée. Ainsi que « la mise à disposition ».
[27] Carte d’identité d’étranger n°36. C.A. 80. 827, valable jusqu’au 30 novembre 1943. Dossier BS2, déjà cité. « Mise à disposition »
[28] De la BS 2 : Lefol et Taverne. Du commissariat du 6e, Ganie et Leboube.
[29] Voir la fiche wikipédia, Brigades Spéciales, et S. Courtois, D. Pechanski, Adam Rayski, Le Sang de l’étranger. Les immigrés de la M.O.I., Fayard, 1989.
[30] J’avoue que j’ai manqué de présence d’esprit quand j’ai rencontré David Diamant et ne lui ai pas posé assez de questions précises (un comble pour une historienne, rompue de surcroît à la pratique de l’histoire orale !) Il n’a pas été très disert, lui non plus, mais il était ému de nous rencontrer, mon père et moi.
[31] David Diamant, Combattants, op. cit., 1983, p. 168. Mon père, bien que très jeune alors, se souvient de ces réunions clandestines et m’en avait parlé quand j’étais adolescente.
[32] David Diamant évoque Alfred Basserman « compagnon de combat », dans Combattants, op. cit., et dans Les Juifs dans la Résistance en France (1971). Il était secrétaire CGT des tailleurs à la Bourse du Travail de Paris et membre de la direction du 2e détachement des FTP-MOI. Il est déporté par le convoi 60 et est rescapé. Pour Borszeczewski, il s’agit probablement d’Idel (Ydel) Barszczewski, dit Idl Korman, dit « Orléans » sur l’organigramme de la BS2 avant que la police puisse l’identifier. Il était l’adjoint d’Adam Rayski. Né le 14 mai 1905 en Pologne. Membre de la direction centrale UJRE, torturé, puis envoyé à Drancy en septembre 1943. Fait partie du commando du tunnel de Drancy, dont étaient aussi membres les deux frères René et Georges Geissmann, dont nous parlerons plus loin. Déporté par le convoi 60, le 7 octobre 1943, à Buna-Monowitz. Revient à Paris en juin 1945. Permanent UJRE, il s’investit dans la défense de la culture yiddish. Il meurt en 1979.
[33] Boria (Baruch) Lerner, né le 15 décembre 1914 en Bessarabie, est arrêté le 26 (ou 29) juin 1943, avec sa compagne Hadassa Tennenbaum (Dédée), torturé puis interné à Fresnes, le 12 juillet 1943. Condamné à mort le 20 septembre par un tribunal militaire, fusillé au Mont Valérien le 1er octobre. A plusieurs actions armées à son actif. Sa femme, déportée à Auschwitz, est revenue de déportation. Elle retrouve son fils, Daniel, qui a émigré en Israël et a vu son propre fils, Baruch, assassiné par un Palestinien.
[34] Nous étions des combattants. Les jeunes juifs communistes dans la Résistance 1940-1945, réalisé par Pierre Chassagnieux et Pauline Richard, produit par la MRJ-MOI, 2017, DVD.
[35] Rapopport est le nom de la responsable de l’UJRE à ce moment-là. Est-ce elle dont Golda aurait eu la cartes de textile ?
[36] Cahier de Mutations Drancy. Hasard familial triste, Golda arrive à Drancy le même jour que Germaine, Daniel et Jacques, la femme et les jeunes enfants de mon grand-oncle maternel Léon Sandler, lui-même interné comme résistant communiste à la prison de la Santé avant sa déportation en 1944. Ils ne reviendront pas. Leur père, si.
[37] David Diamant, op. cit.
[38] Jean-Marc Dreyfus et Sarah Gensburger, Des camps dans Paris. Austerlitz, Lévitan, Bassano, juillet 1943-août 1944, Fayard, coll. « Pour une histoire du XXe siècle », Paris, 2003. J’ai souhaité rencontré M. Dreyfus pour avoir plus de renseignements, mais il n’a jamais donné suite à mes demandes, bien que je lui en ai brièvement expliqué l’objet au téléphone. J’avais cependant participé plusieurs années auparavant à une table-ronde qui réunissait des témoins et des chercheurs. Il s’est avéré que mon voisin, un charmant vieux monsieur, avait bien connu Georges Geissmann, ami de Genia au camp de Bassano et qui a ensuite élevé mon père. Il avait sur lui des photos qu’il m’a montrées où figuraient les deux frères Geissmann et mon père, à Marseille. Je n’ai malheureusement noté ni son nom ni son adresse, étant partie avant la fin de la réunion. Il avait été prisonnier au camp Lévitan et Austerlitz, en conservait des photos où il figurait avec Georges Geissmann. Avis à ceux qui le reconnaîtrait dans ce faible portrait. (Histoire personnelle et professionnelle ne font pas toujours bon ménage !)
[39] Georges et René ont été tous deux membres du groupe qui, à la mi-septembre 1943, a tenté de percer un tunnel pour faire évader les prisonniers du camp de Drancy. Cf. le témoignage d’André Ullmo, « Tunnel de résistance », publié dans Libération, le 9 juin 2001. Georges Geissmann a publié, à l’automne 1944, dans un organe de la Résistance, L’Homme libre, organe de du Mouvement de Résistance des P.G et des Déportés, un récit qui raconte la vie dans les camps parisiens.
[40] Témoignage de Renée, ma mamie, qui n’a jamais varié, malgré mes doutes sur cette version idyllique.
[41] Témoignage d’Edward Klejman, fondé sur ce que lui ont raconté Georges et René Geissmann après la guerre.
[42] Par arrêté du directeur général de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre en date du 20 novembre 2010 :I. – La mention « Mort en déportation » est apposée sur les actes et jugements déclaratifs de décès de : « Klejman (Golda), née le 14 janvier 1914 à Lodz (Pologne), décédée le 5 août 1944 à Auschwitz (Pologne). »JORF n°0297 du 23 décembre 2010 page 22575 texte n° 36 NOR: DEFM1030702A ELI: Non disponible.
[43] Sandrine Labeau, historienne qui a collecté les dossiers aux archives de Caen pour Convoi 77, ne voulait pas y croire non plus. Pour elle, « elle avait tous les éléments pour être sélectionnée »… Georges Geissmann avait de bons réseaux et a cherché partout pour avoir des nouvelles. À peine rentré de captivité, mon grand-père a fait de même.
Bonjour,
je suis content, très content, de rencontrer cet enfer juif…
Ma famille juive polonaise vivait à Varsovie et Perla Zandt, ma Maman a étudié à LODZ…
Cette famille a-t-elle des survivants ?
Je serais heureux de pouvoir rencontrer leurs descendants (peu importe le pays, je communique avec Skype)
j’ai retrouvé ma famille aux USA.
A ma connaissance, il n’y a eu aucun survivant de la famille en Pologne. En France, mon père, mon frère et moi. Ailleurs, je ne sais pas…
Nous serions intéressés d’entrer en contact avec Laurence Klejman au sujet des Sonnenblick qui probablement ont des liens avec notre famille. Merci
Mr et Mme Lyszyk,
votre demande a été transmise à Laurence, qui a dû vous répondre. Bien cordialement.
Serge JACUBERT